édito

Depuis 2012, les Rencontres cinématographiques Palestine : Filmer C’est Exister – PFC’E ont proposé au public des éditions thématiques qui ont permis de découvrir la richesse de la culture cinématographique palestinienne et d’approfondir la réalité vécue par le peuple palestinien.

REGARDS DE RÉALISATRICES PALESTINIENNES

Pour sa 8ème édition, PFC’E met en avant les Regards de réalisatrices palestiniennes, afin de participer à la nouvelle dynamique des luttes des femmes qui, en 2019, se font entendre dans beaucoup de pays du monde, dont la Suisse avec la grève des femmes du 14 juin et en Palestine : en septembre, plusieurs miliers de femmes et d’hommes dénonçaient le meurtre d’une jeune femme par des membres de sa famille et réclamaient une loi pour protéger les femmes.

Dans le cinéma palestinien, les femmes cinéastes sont présentes depuis longtemps. Après les pionnières des années 70-80, de nombreuses femmes arrivent sur les tournages à la fin des années 90 : scénaristes, réalisatrices, monteuses, productrices. Elles passent par le format court et le documentaire, car moins chers et nécessitant une équipe technique réduite. Elles ont en commun l’exil, et le fait d’avoir étudié le cinéma à l’étranger leur permet de trouver des soutiens et des co-productions pour réaliser leur 1er long-métrage fiction, ce qui élargit la diffusion de leurs films. C’est l’histoire par ex. de Mai Masri, Cherien Dabis et Annemarie Jacir.

Depuis 10 ans, plus de 50 % des cinéastes palestiniens sont des femmes, dont beaucoup sont nées et vivent en Cisjordanie et à Gaza. Les jeunes réalisatrices marchent dans les pas de leurs ainées et toutes affrontent le monde de la production cinématographique encore difficile d’accès pour les femmes, ….en Palestine, comme ailleurs ! Mais elles doivent en plus surmonter le conservatisme présent dans la société palestinienne.

L’édition 2019 donne un aperçu de la richesse et des sensibilités spécifiques qui se dégagent des réalisations des cinéastes palestiniennes. D’une part, la résistance quotidienne contre l’occupation israélienne et la dépossession de leurs terres est omniprésente et les réalisatrices ne manquent pas de montrer les conséquences particulières de cette réalité sur les femmes, par ex. lors de la 1ère Intifada. D’autre part, leurs films évoquent aussi la force des traditions artistiques comme la musique et la broderie, ou encore l’importance de l’Histoire et de la mémoire. Enfin, elles font éclater les stéréotypes culturels et abordent des questions sensibles, considérées souvent comme tabou dans la société patriarcale et par leurs collègues masculins : les choix amoureux assumés, les tortures sexuelles infligées aux prisonnières·niers, l’inceste, les déceptions lors du retour tant rêvé au pays, les féminicides.

Cette 8ème édition rend hommage à Jocelyne Saab, cinéaste libanaise décédée en janvier, en projetant les films qu’elle a réalisés sur les Palestinien·ne·s entre 1974 et 1982.

PFC’E est heureux d’accueillir Mariam Shahin, Ghada Terawi, Buthina Canaan Khoury, ainsi que Shayma Awawdeh et Zeina Ramadan, jeunes réalisatrices qui ont pu tourner leurs premiers films dans le cadre du festival universitaire Dar Al-Kalima à Bethléem et de l’association Shashat Women Cinema.

Nous remercions chaleureusement les Cinémas du Grütli et Fonction : Cinéma qui accueillent PFC’E cette année. Nous souhaitons la bienvenue au public dans ces nouveaux lieux, où se tiendront les nombreuses discusions et débats thématiques avec les cinéastes invitées.

Le Comité

Novembre 2019